jeudi 31 mai 2012

Valls : les leurres du beau Manuel

Le Sinistre (1) de l'Intérieur, Manuel Valls, était l'invité du JT de 20h le jeudi 31 mai sur France 2, et répondait aux questions de David Pujadas.

David Pujadas affime que son invité est le ministre le plus populaire du gouvernement; si c'est vrai cela signifie que l'intoxication socialiste est efficace : l'actuel gouvernement a intérêt à faire jouer à Manuel Valls le rôle de caution réaliste et sécuritaire de sa politique. Pendant la campagne des primaires citoyennes du PS, Arnaud Montebourg, concurrent de Valls, déclarait dans un débat que celui-ci n'avait plus beaucoup de chemin à faire pour se retrouver à l'UMP. C'était un propos polémique. Cette affirmation avait pour but d'éloigner de Valls des électeurs prenant part à ces primaires, mais cette légende peut maintenant le servir, ainsi que l'ensemble du gouvernement, dans l'opinion publique en général.

On a eu droit à un prétendu moment d'émotion  à propos de la récente visite de Valls à Madrid. Il y a rencontré son collègue espagnol. Valls est né à Barcelone en 1962, est devenu citoyen français, ... et parle espagnol comme un lycéen de Première qui a pris l'espagnol en LV II (2). Valls a cru opportun, voire nécessaire, de protester de son attachement à l'entité France aussi bien dans ses quelques mots en français et en castillan à Madrid que devant David Pujadas, également natif de Barcelone. Je constate que la Grande Nation traverse une phase de saoulographie cocardière assez navrante, de Jean-Luc Mélanchon avec son slogan "France, la belle, la rebelle" au FN en passant par les inepties de François Hollande souhaitant que, pour les jeunes issus de l'immigration, Français devienne le plus beau nom que puisse porter un citoyen du monde. Le mur du çon est franchi.

Manuel Valls a rappelé que pour lui et ses amis politiques l'immigration ne doit plus être "un chiffon rouge" agité "pour diviser les Français" (sic). Traduisez : débattre de l'immigration sud-nord et de ses conséquences doit rester, ou redevenir, un tabou, ce serait "prendre en otage" les immigrés. Autres rappels : il y aura régularisation de résidents illégaux appelés par litote "sans papiers", selon des critères qui seront les mêmes pour tous; et le Sinistre de l'Intérieur de souligner que, pour lui, l'intégration (3) est un sujet plus important, plus essentiel que les flux migratoires qu'il entend simplement "maîtriser", en luttant contre l'immigration clandestine (c'est bien la moindre des choses).

Les électeurs qui ne font pas le choix de la gauche, et qui font du beau Manuel leur ministre socialiste préféré doivent pourtant comprendre que le Sinistre de l'Intérieur :

-entend sortir l'immigration du débat politique : un prétendu consensus républicain devrait se dessiner autour de l'acceptation de la continuation et de l'amplification à moyen terme des flux migratoires sud-nord, et de politiques d'intégration ou "de la ville", quel qu'en soit le coût : ils (les immigrés) ont des droits sur nous et on a un devoir d'intégration à leur égard; une pluralité d'opinions sur la question n'est moralement et politiquement pas permise par la Gauche : ce serait une "prise d'otages" (sic);

-n'entend pas limiter le nombre d'illégaux régularisés : les critères de régularisation seront les mêmes pour tous, et c'est tout, et ce n'est pas rassurant;

-fera bénéficier les anciens "sans papiers", c'est-à-dire les résidents illégaux régularisés, des politiques d'intégration; donner des papiers à un sans papiers, c'est lui permettre de bénéficier des politiques spécifiques pour le logement, la formation professionnelle, l'emploi, l'éducation, le regroupement familial etc... L'expression "sans papiers" est trompeuse : les sans papiers ne se contentent pas de papiers; dès qu'ils ne sont plus "sans papiers", ils ont vocation à être vos voisins, les parents des camarades de classe de vos enfants, vos collègues, et demain vos concitoyens pour voter pour M. Valls et ses amis, et vous remplacer dans cette démarche si vous vous détournez de cette famille politique. Les régularisations de résidents illégaux qui deviennent ainsi nos voisins, collègues, concitoyens, on en a déjà eu, et d'ampleur massive : en 1981, en 1997. On a déjà donné.

Manuel Valls était encore maire de banlieue (4) ce 31 mai. Une partie de ses administrés a inventé de nouvelles formes d'expression, inspirées notamment des SMS ou textos. Pour maire d'Evry, on pourrait dire, sans trop d'iirévérence, merdévry. En s'inspirant simplement de cette culture, et aussi de Léon Daudet évoquant Edouard Herriot, le "merdelion". En matière de communication, Manuel Valls s'y connaît : il a été directeur de la communication de la campagne présidentielle de François Hollande.

Dans cette fonction, il a défendu Ségolène Royal lorsque celle-ci a prétendu que Nicolas Sarközy avait besoin d'être réelu pour échapper à la justice (recyclage d'un argument utilisé contre Silvio Berlusconi par ses adversaires politiques et des médiats locaux et internationaux). Si cette affirmation de Madame Royal n'est pas confirmée, Manuel Valls se sera associé à une campagne diffamatoire.


NOTES

(1) Manuel Valls avait proposé que le PS change de nom, abandonne le mot "socialiste", et se réfère simplement à la Gauche; c'était avant que Jean-Luc Mélanchon ne quitte le PS et ne fonde son propre parti, le Parti de Gauche; désigner Manuel Valls comme Sinistre, c'est satisfaire un de ses voeux;

(2) LV II = 2e langue vivante étrangère;

(3) Manuel Valls a bien eu tort de refaire brièvement allusion à ses origines en évoquant l'importance de l'intégration des personnes issues des flux migratoires sud-nord. Cela signifie : ça a réussi pour moi et ma famille, donc je veux que d'autres en bénéficient aussi. Je suis d'avis au contraire que le critère le plus sûr d'une intégration réussie est l'abandon de la référence à l'expérience migratoire (mais pas forcément à la culture héritée). L'ancien immigré bien intégré est celui qui, devant la perspective de nouveaux flux migratoires, va se demander quelles en seraient les conséquences pour la communauté entière, et pas seulement pour les immigrés déjà en place. La bonne intégration d'un Allemand de souche huguenote française, dont les ancêtres ont quitté la France suite à la révocation de l'Edit de Nantes en 1685, peut se mesurer à ses réticences devant l'immigration extra-européenne aujourd'hui. Les Siciliens, les Calabrais et autres Italiens du Mezzogiorno qui ont fait souche dans le nord de l'Italie attestent de leur bonne intégration dans la communauté locale en soutenant la Lega Nord contre la perspective de nouveaux flux migratoires. Dire : je suis d'origine immigrée, mes parents ont été intégrés, ça a marché, et je veux que ça continue pour d'autres, c'est alimenter la méfiance, illustrer sa partialité;

(4) pour moi, la notion de banlieue a d'abord eu un tout autre sens : la banlieue, c'était les territoires desservis par des "trains de banlieue", c'est-à-dire des trains électriques, peu bruyants et ne dégageant pas de fumée; c'était un endroit où les maisons individuelles s'appelaient des pavillons; c'était un endroit où les maisons étaient vendues par l'intermédiaire d'agences immobilières et non directement par les notaires (comme dans l'Aisne d'où je venais); enfin, c'était un espace intermédiaire entre la grande ville, Paris en l'occurence, et la province proche. Il y a une dizaine de jours, un authentique "produit de banlieue" d'aujourd'hui qui voyageait comme moi sur la ligne C du RER transilien m'a intimé l'ordre de m'éloigner de lui et de son camarade si je voulais "rentrer chez (moi) en paix" (sic) : le camarade fumait dans le train et je lui avais demandé d'éteindre sa cigarette, en vain. Aux menaces, le "produit de banlieue" d'origine visiblement africaine ou afro-caribéenne, a ajouté l'explication contextuelle suivante : c'est Hollande qu'est passé, alors on s'en bat les couilles, tu peux plus nous faire chier (re-sic).



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