Les médiats qui paraissent vers la mi-novembre 2010 relataient la mésaventure survenue à des salariés d'une entreprise qui ont été licenciés pour avoir, sur Facebook, critiqué ou ridiculisé la direction de leur entreprise.

Je connais un dénommé J.-M. L. qui, il y a quelques années, a failli être révoqué de son emploi public, non pour avoir critiqué l'institution dans laquelle il servait et qui était alors administrée par le ministre socialiste Allègre, ou pour avoir émis des opinions hétérodoxes sur le contenu et la pratique de sa profession, mais pour des contributions à des forums de discussion sur Internet, portant notamment sur l'Histoire, disons,  du second tiers du XXème siècle, et qui auraient contrevenu aux dispositions de la loi 90-615 du 13 juillet 1990 dite loi Fabius-Rocard-Gayssot.


DELATION  "CITOYENNE"  SOUS ANONYMAT

De "courageux" collègues jamais identifiés (-ées) semblent s'être effarouchés (-ées) de ces contributions, et ont alerté leur hiérarchie commune qui s'est fait pendant quelques semaines l'auxiliaire du Guépéou de la Pensée. Comment éliminer le mal pensant, la "brebis galeuse" ? D'abord en le privant d'une possible protection :  notre impertinent personnage représentait alors un syndicat dans une instance en charge de "l'hygiène et de la sécurité" dans les établissements scolaires et universitaires du département. Le représentant de l'administration dans le département profite d'une audience accordée à une délégation du syndicat de J.-M. L. pour le "balancer" en faisant lecture de morceaux choisis ses contributions sur des forums Internet, et signifie à la délégation syndicale qu'il s'attend à ce qu'elle ne défende plus désormais ce dangereux personnage, et envisage, selon des témoins présents à l'audience, sa suspension très rapide de ses fonctions avant révocation, compte tenu de la gravité et de l'urgence attribuées à l'affaire.

J.-M. L. est prévenu de cet incident par son syndicat qui, d'une part lui fait savoir que cette affaire l'embarrasse et d'autre part essaie de s'assurer que J.-M. L. est au courant de ce qu'une procédure est engagée contre lui, ou va l'être. Notre J.-M. L. reconnaît les faits pour lesquels il est mis en cause, mais affirme entendre parler pour la première fois de cette affaire. Cette circonstance : que l'administration mette J.-M. L. en cause à son insu devant une organisation qu'il représente par ailleurs et qui est censée éventuellement le défendre, conduit le syndicat à une attitude très prudente.

Le syndicat s'étonne que J.-M. L. n'ait pas été tenu au courant, annonce qu'il ne le défendra pas si la loi a été enfreinte, mais demande que J.-M. L. puisse prendre connaissance de son dossier.

Embarras de l'administration qui doit constater que J.-M. L., s'il a choqué certains (-aines) de ses collègues, délateurs (-trices) au nom du leur conception du civisme et montré de l'irrespect pour les "valeurs" dont ils/elles se réclament, n'a enfreint aucune loi, n'a commis aucun crime ou délit, ou infraction quelconque, a rédigé ses contributions signées de son nom, en dehors de ses heures de service et depuis son ordinateur personnel à son domicile (contrairement à certaines hypothèses avancées au début). Dans un premier temps, l'administration affirme qu'il n'y a pas de dossier à consulter puisque les contributions de J.-M. L., relevant d'une activité non professionnelle, n'ont pas leur place dans son dossier administratif. Puis, dans un second temps, plusieurs mois après, propose que J.-M. L. puisse venir prendre connaissance des contributions recueillies par les collègues de J.-M. L. et lues devant la délégation syndicale.

Pendant ce temps, sur les conseils d'un avocat, J.-M. L. porte plainte contre X pour dénonciation calomnieuse. La procédure n'aboutira pas : le représentant de l'administration dans le département n'est pas en mesure, du moins le prétendra-t-il, de révéler la provenance de la mise en cause de J.-M. L. et de la transmission de copies de ses contributions. La juge rend une ordonnance de non lieu : X est introuvable et restera anonyme. J.-M. L., qui renonce à interjeter appel de l'ordonnance de non lieu (pour pouvoir récupérer sa consignation (*)  auprès du tribunal), se rend auprès des services départementaux de son administration en compagnie d'un témoin, éditeur, multi-condamné pour infractions à la loi Fabius-Rocard-Gayssot. Par le choix de ce témoin, J.-M. L. marque son absence de repentance. La consultation des copies de ses contributions confirme la modération des propos de J.-M. L., l'absence d'infraction à quelque loi que ce soit. On est en présence d'une tentative de déstabilisation lancée par des collègues zélés (ées), relayés (-ées)  un temps par leur hiérarchie. Les délateurs (-trices) de J.-M. L. sont restés(-ées) anonymes et jamais inquiétés (-ées), peut-être couverts (-tes) par leur hiérarchie.


LA LOI DU MILIEU

 J.-M. L. a failli être révoqué, en tout cas mis à l'index, détruit professionnellement, pour des faits sans rapport avec son service, mais seuls la maladresse et l'excès de zèle "citoyen" et de hâte de ses collègues et délateurs (trices) ne l'ont pas permis. Toute la morale d'un "milieu" communiant dans la référence à de prétendues "valeurs citoyennes", prêt à seconder un véritable Guépéou de la Pensée est là.

(*) Quand une personne dépose une plainte devant un tribunal pénal, elle doit déposer une somme d'argent, appelée consignation; si la plainte a été déposée abusivement, c'est-à-dire non pas forcément à tort, mais manifestement sans raison, la somme est conservée par le Trésor Public, et est donc perdue par le plaignant; dans le cas relaté ici, J.-M. L. a pu récupérer cette consignation (de l'ordre d'environ 900 à 1000 euros) : le dépôt de plainte était fondé. Mais si le plaignant avait fait appel de l'ordonnance de non lieu et s'était pouvu devant l'instance dénommée chambre d'accusation, la consignation était conservée par le Trésor Public jusqu'à la fin de la procédure devant l'instance d'appel.